De la Suisse à l'Italie

Le départ de Biasca a été à plusieurs fois repoussé, mais finalement nous étions à nouveau sur la route et avions repris la via Alpina. La monté a été rude! Le dénivelé était fort. La journée était chaude et humide. Mais surtout, 10 jours sans marche ça efface l'endurance acquise. Et je ne parlerai pas du poids des sacs remplis de provisions. Mais quel plaisir que de sentir à nouveau le corps en mouvement, apprécier les repas et l'eau sans goulimie. Et puis, un peu plus haut, nous avons trouvé un torrent où nous avons enfin pu nous laver! Par contre, j'y ai également perdu mon baton le plus précieux et la marche avec un seul baton, quand on est plus habitué, c'est fatigant.

La cabane del Lago, juste avant la cabane de Cava, était un endroit magnifique! Avec un lac juste en dessous, une cuisine, des bas flancs et une vraie intimité! Petits gestes tendres, j'ai coupé les cheveux de Mariane et elle m'a coupé la barbe. C'est aussi ça le plaisir de la marche en couple. J'étais heureux!

Le lendemain, encore une belle journée ensoleillée. Nous revivions après ce mois de juillet pluvieux. Deux montés d'environ 300m chacun, l'une au Passo del Mauro et l'autre à la Brochetta di Pianca étaient d'un dénivelé parfait pour profiter des paysages et de la marche.

En soirée, nous avons campé près du village de Cauco et utilisé pour la première fois le réchaud. ça puait au préchauffage, mais c'était rudement efficace. Il restait à voir ce que ça donnait en terme de consommation. Il fallait aussi faire attention aux fourmilères géantes Photo.

 

Très vite, le corps se réhabituait, mais en meme temps faisait signe de fatigue sous le cumul d'effort. Nous fumes donc soulagés de faire une pause dans la monté de l'Alp d'Aiol, au bord d'une fantastique salle de bain naturelle. Au programme: bains à remous, cascades massantes et piscine... Juste un hic, l'eau était vraiment froide! Heureusement, le soleil tapait fort.

Je marchais en pensant au seigneur des anneaux. J'étais Aragorn fonçant au secours des hobbits. Heureusement, Mariane me rappellait à l'ordre quand, plongé dans mes pensées, je prenais un mauvais sentier...

 

Ce soir là, nous avons campé près du passage de Buffalo pass. Il faisait encore assez jour pour en profiter pour lire, écrire et bonzer. La journée a été plein. Nous étions positivement fatigués. La chaleur, la lumière, l'odeur des plantes autour, nous donnaient une très bonne humeur. Nous aurions fait l'amour si la marche n'avait pas épuisé nos énergies...

      

Pendant la nuit, nous avons entendu des petits éboulements de roches ainsi que des appels émis par un animal. L'anecdote était très drole puisque c'est initialement Mariane qui m'a réveillé en disant “Cochon!” Je me demandais si elle me disait cela parce que je ronflais, mais en fait par cochon, elle entendait sanglier, car elle pensait que c'était l'animal que nous entendions. Moi, je pensais plutot que c'était un cerf ou un chamois.

 

Au petit matin, alors que nous rangions notre matériel dans la tente, nous avons entendu des bruits de sabot puis de galopade. J'ai juste eu le temps de sortir la tete de l'ouverture pour apercevoir les derniers chamois qui me regardaient avant de descendre dans la vallée. Ils broutaient probablement autour de la tente avant de nous entendre. C'est l'un de ces moments uniques qui font de ce voyage un conte, une immersion en nature telle que meme les animaux ne font plus attention à nous dans le silence.

 

Le passage vers la vallée de Soazza a été plus long que prévu. En fait, rendu en haut, il fallait longer le flanc sur la face nord pendant un moment avant de pouvoir enfin passer de l'autre coté.

De plus, Mariane n'avait pas eu une nuit suffisante pour récupérer. La connexion entre nous passait mal et mon esprit s'égarait sur un de mes vieux combats intérieurs: le passé relationnel de la femme que j'aime.

“ Ha... que de futilité dans l'esprit masculin alors qu'il nage dans le bonheur”. Moi, j'étais noyé dans le mutisme et je ne parlais plus à Mariane. Je ressassais ces vieilles histoires,     d'anciennes relations et je me sentais qu'un parmi tant d'autres... En une matinée, j'avais perdu mon titre d'Etre Exceptionnel. Mariane a senti mon malaise et a essayé de parler avec moi... J'ai rejetté la perche.

Après quelques heures de marche, nous avons enfin parlé ensemble. Cela nous a fait du bien de discuter et mes démons ont disparu. Elle m'a à nouveau confirmé que j'étais l'etre exceptionnel qui lui avait fait découvrir l'amour...

Nous avons campé devant une cabane qui était malheureusement fermée et dont le jardin grouillait de moustiques. Ils ont fait un festin de moi! Je ne sais pas pourquoi, mais j'ai l'impression d'avoir développé une allergie à ces petites bestioles et leur présence m'agresse d'une façon presque maladive. Ca promet pour le reste du voyage... Encore des cris d'animaux pendant la nuit impossible à identifier.

 

Le lendemain, nous avons pris le sentier vers le passo de Forcela; la frontière entre la Suisse et l'Italie. Cette randonnée était vraiment parfaite. Elle suivait une longue vallée qui remontait vers le col. Le dénivelé était constant et presque sans virage. Le soleil était toujours présent (il ne nous a plus laché depuis Biasca). Un troupeau de chèvres de montagne nous attendait au Passo et certains males s'affrontaient entre eux.

Je ne savais pas qu'ils étaient aussi violents! Je n'aurais pas aimé etre la cble. Passé le col, nous étions en Italie! Faute de trouver un espace plat aux alentours, nous avons campé directement sur le sentier.

Avant de nous coucher, nous avons entendu des bruits de cloches qui se rapprochaient. En ouvrant la tente, nous sommes tombés nez à nez avec un troupeau d'anes curieux qui nous ont épié un instant avant de rebrousser chemin. Ces dernières journées ont vraiment été riches en contact animalier.